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Pour un mot d’amour – Au nom du Ciel 3

Le troisième chapitre du roman autobiographique et channeling Au nom du Ciel, nous plonge dans l’atmosphère hivernale et rude d’un petit village de la région la plus montagnarde du Portugal. Nous sommes à l’époque de Salazar et c’est au cœur de ce décors pittoresque que le futur père de Ganji découvre l’amour…

Les pages que vous allez lire m’ont été transmises jour après jour par mon guide Iurikan et sont de loin le plus beau témoignage que j’ai reçu du Ciel. Elles revisitent ma vie depuis ma naissance, en dévoilant le sens caché de chaque épisode marquant. On y découvre la scène occulte de notre monde mais aussi, la présence à mes côtés, discrète et touchante, des anges qui se sont promis de « me rendre un jour mon sourire » et ont fait de moi celui que je suis aujourd’hui. Message d’amour et d’espoir pour tous, je vous livre chaque mois un nouvel épisode. Ganji

Au coeur de la montagne, la nuit tombait vers 16h en période hivernale. Il portait sous son veston de laine usée un pull déniché à l’usine et, chaussé de souliers de ville, ses pieds engourdis disparaissaient dans la matière froide et épaisse. Berger de la montagne, loin de ses brebis, Fernando était perdu. Pourtant il connaissait bien ce dédale de ruelles pavées. Qu’importe, il fallait monter, continuer de gravir les escaliers qui succédaient aux sentiers glissants. Le bonheur qui se devinait en lui n’appartenait qu’à elle : Carla prenait toute la place dans sa tête. Il sentait encore sur sa joue ses lèvres chaudes et charnues et c’était un tel brasier en lui que la neige semblait fondre sous ses pas. Quelques rares réverbères menaient ses pas. Il était déjà tard, Fernando rentrait chez sa mère à vive allure. Cette ogresse pouvait le dévorer et le réduire en cendres d’un simple regard. Bientôt son image terrifiante envahit ses purs sentiments amoureux.

Soudain, il s’arrêta net devant deux yeux luisants à l’angle gauche de la rue. La respiration suspendue, il perçut clairement le souffle chaud d’une bête, délicatement révélé par la lueur du néon. Un regard fixe, une présence lourde, un léger grognement. À l’évidence il s’agissait d’un loup, certes de petite taille, mais capable tout de même de s’attaquer à un homme comme lui. Sa main tremblante ne trouva pas son canif dans la poche extérieure de sa veste. Quelques mètres à peine les séparaient. Fernando se ressaisit et tout son corps montra des signes instinctifs de défense car l’affrontement était hélas inévitable. La louve attendait patiemment sa proie, sagement blottie dans le coin d’une impasse depuis quelques heures car cette jeune femelle devait nourrir ses petits. Elle-même était affamée et l’esprit confus ne songeait qu’à survivre à sa folie. Elle avait dévalé les pentes escarpées suivie de ses trois petits à la recherche de mets mystérieux dont les humains avaient le secret. D’envoûtantes odeurs avaient eu raison du petit groupe en cette période d’abstinence. Dévalant le long d’une paroi, un amas compact de neige s’effondra brisant subitement cette tension quasi palpable. Apeurée, la louve disparut au loin, suivie de petits gémissements plaintifs.

Carla avait définitivement quitté son esprit et instantanément il reconnut l’abattoir. Il devait prendre à gauche et grimper à présent des rues dangereuses, qu’il prendrait en zig zag pour ne pas glisser. Pas un bruit dans cette ville endormie saisie depuis des jours par la neige. Enracinée dans la Serra da Estrela, la ville de Manteigas était fille d’un nord rural et austère. Mais elle était digne : elle travaillait en permanence à la confection de pulls et de tricots épais qu’elle exportait avec orgueil à travers tout le pays. Fernando y travaillait le jour et la nuit, dans un enfer mécanique abrutissant qui lui fournissait de la chaleur, un luxe fort appréciable. Elle avait ce mérite. Le clocher de Santa Maria afficha vingt-deux heures dans un vacarme assourdissant. A la seule vue de l’horloge, il se maudit d’avoir laissé ses sentiments envahir son esprit. Mais l’univers était soudain devenu plus beau, plus supportable grâce aux mains aimantes de Carla.

La dernière ruelle qui débouchait sur la cour de la maison familiale était à peine plus large que ses épaules. Et il eut un ricanement ! Un jour il quitterait ces lieux exigus, cette petitesse l’écoeurait depuis trop longtemps. Pris en étau dans cette vie abrutissante, chaque jour il étouffait d’avantage. Tous deux avaient souvent rêvé de fuite, par-delà cette alcôve maudite, ces roches escarpées, cette prison minérale. Des fantasmes de rues larges et d’échoppes multicolores avaient distillé dans leurs veines tendues l’obsession de quitter la misère, la soupe matinale, la déflagration des machines, le gel permanent des cimes.

Fernando avait parcouru depuis son plus jeune âge des sentiers de solitude à travers les noirs sommets, disparaissant au milieu des troupeaux qu’il menait infatigablement de l’auberge familiale aux riches pâturages. Sa mère le chargeait des besognes les plus rudes des mois durant, loin de la ville rassurante. Qu’avait-il fait pour mériter un tel traitement ? Peut-être l’avait-il mérité ? Elle devait avoir ses raisons, pensait-il. Son père n’était plus de ce monde désormais et cela aussi, il pensait l’avoir accepté. Fort heureusement, il s’était trouvé un père et des centaines d’amis à quatre pattes. Tio Carninha, en vieux célibataire, le gardait parfois des heures sous son large manteau noir et l’oubliait là, concentré sur la fumée de sa pipe. Fernando s’était endormi plus d’une fois dans ce refuge improbable où l’espace d’un temps il reprenait ses forces. Ça sentait le jambon, le vieux tabac froid et le bon vin sous sa cape de cuir. Tio Carninha aimait ce garçon et se faisait un devoir de le protéger. Les longues nuits passées ensemble à veiller les bêtes apeurées les avaient unis comme père et fils.

En poussant la porte à travers laquelle les flocons s’engouffrèrent aussitôt, il s’imaginait déjà sombrer dans la chaleur du lit partagé avec son frère. Mais quelle était cette lueur discrète de lampe à pétrole ? Il pénétra la pièce et, voulant éteindre ce qu’il crut oublié par l’un de ses frères, son crâne reçu un coup d’une violence inouïe. Ses jambes flanchèrent, son corps se déroba en perdant connaissance, quelques pas maladroits encore et il s’effondra à peine conscient des paroles de colère et de haine qui s’abattaient sur son corps inerte. Sa mère le piétinait et lui assénait des coups de bâton à l’aveuglette lesquels heurtaient par moment ses yeux, ses oreilles et son dos. L’espace d’un moment la lumière avait disparu, Fernando crut avoir perdu la vue. Sur le sol gelé, son corps long et maigre s’était recroquevillé comme pour parer à une nouvelle agression. Quelques mots résonnaient encore dans son esprit choqué : « Paresseux ! Voyou ! Proxénète !… ». Lorsque ses yeux s’ouvrirent à nouveau, plein de larmes, l’éclat foudroyant de la lune le rappela à la vie. Les contours mêmes des meubles s’étaient faits agressifs. Il se jura de quitter ce pays.

Ganji

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