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Bouddha ou la voie du détachement absolu

Pourquoi est-il si difficile de réaliser l’état de Bouddha ? Découvrez en quoi notre culture sabote à chaque instant nos plus beaux élans spirituels en s’opposant ouvertement à la voix du détachement et comment y remédier !

Combien d’entre nous n’ont-ils pas rêvé un jour d’emprunter les pas du célèbre Bouddha Siddharta Gautama ? Ce grand maître spirituel népalais réalisa l’Éveil ou l’état de Bouddha, l’expérience sublime de la fusion avec la Conscience Universelle Divine à travers le dépassement de soi et le détachement absolu de toutes les illusions de l’égo. Mais pourquoi nous est-il si difficile d’y parvenir ? Cet article met le doigt sur notre talon d’Achille : notre addiction contemporaine aux émotions et sensations fortes !

Il est presque impossible pour nous occidentaux de comprendre l’essence même du détachement tant nous nous identifions toute notre vie à nos émotions et à nos sensations, et par extension à nos désirs et pulsions… Et ceux-ci sont si forts, que nous leur donnons d’autant plus de crédit et d’attention. En fait, la plupart d’entre nous, vivons pour la sensation.

Sans elle nous nous sentons éteints, sans vie. Toute cette « féerie » intérieure, qu’elle soit bonheur, plaisir, satisfaction ou à l’inverse douleur, souffrance, manque et frustration, nous donne le sentiment d’être « vivants », et apporte un sens à notre existence morne. Pourvu que nous sentions quelque chose ! Pourvu que nous soyons emportés loin de nous même, loin de la médiocrité, loin de la saveur insipide du quotidien trivial.

Naissance de la dépendance affective et sexuelle

Ces émotions et sensations nous définissent tant et si bien qu’il nous est presque impossible « d’être », en dehors de celles-ci. Nous nous identifions, nous nous confondons complètement avec elles. L’amour, la passion, le sexe deviennent ainsi des drogues de premier choix car les sensations et émotions que ces états nous procurent sont de loin les plus puissantes que l’on puisse vivre. Alors nous courons tous après. Nous devenons addicts et tombons dans la dépendance affective et sexuelle.

Pour autant, nos émotions, nos sensations ne sont pas nous. Pas plus qu’elles ne sont le reflet de la réalité. Au contraire, elles masquent, maquillent, déguisent ce que nous sommes et nous présentent une version erronée du réel en lui surimposant un filtre puissant.

Lorsque nous nous donnons à une passion, quelle qu’elle soit, c’est l’illusion qui triomphe et nous nous perdons. Bientôt, émotions et sensations nous possèdent entièrement. Elles nous « animent » comme un marionnettiste anime artificiellement un pantin. Et tandis que nous jouissons de notre passion, que nous rions et affirmons reprendre goût à la vie, nous sombrons. Nous nous absentons à nous-même et à notre vie. Au fond, nous n’étions déjà pas vraiment là, depuis bien longtemps. Nous n’étions pas « incarnés » et ce vide qui nous définit, appelait à se remplir, comme un estomac insatiable.

Et lorsque par malheur, nous sommes contraints de nous éloigner de nos passions (lors d’une rupture sentimentale par exemple), tout notre être se déchire. L’arrachement est absolu. Nous nous sentons agoniser, défaillir, dévaler la pente. En réalité, nous retombons simplement dans le réel, nous réintégrons notre identité d’origine, notre vide existentiel et surtout ces blocages profonds irrésolus qui nous empêchent de vivre et de nous accomplir vraiment, cette vérité que nous fuyons… Et c’est infiniment douloureux.

La voie du détachement, à l’opposé, nous invite à l’abandon de la sensation forte, de l’émotion dévorante, de l’illusion et du fantasme. Essayez donc de passer une journée à vous observer et vous verrez à quel point la rêverie, le fantasque, tentent de vous emporter sans arrêt loin de vous-même et de l’action à laquelle vous êtes occupés. Nous avons besoin de rêver, de fuir. Vous verrez aussi que si vous vous empêchez de fantasmer ou de vous abandonner à vos émotions et sensations, c-a-d si vous pratiquez délibérément le détachement, vous ressentirez du mécontentement, de l’irritation, voire une grande souffrance. Il est très difficile de choisir à chaque instant le détachement, le recul vis-à-vis de soi, de ce que l’on vit.

La voie de Bouddha versus la voix de l’égo

Bien loin d’encourager la voie de Bouddha, notre civilisation cultive l’égo, en bannissant de nos codes l’attitude nécessaire à toute véritable spiritualité : la sobriété. En effet, pour se détacher de soi et des illusions de notre égo, il nous faut entrer dans une certaine austérité et accepter le silence intérieur. Et c’est justement tout ce que nous détestons ! Nous aimons vibrer et briller à travers nos aventures et péripéties humaines, nous ne voulons pas d’une vie banale. Nos profils Facebook en sont la parfaite illustration, ils rivalisent d’imagination pour afficher notre réussite : nous voyageons, nous jardinons, nous écrivons, nous peignons, nous festoyons et sourions à gorge déployée, sans cesse nous tentons de repousser le banal, en affichant notre originalité et nos prouesses quotidiennes. Nous ne nous rendons pas compte à quel point c’est l’égo qui s’exprime et se met en scène constamment. Nous ne voulons pas du réel, nous ne voulons pas « cesser de sentir », cesser d’être « spécial », ce serait pour nous la dégringolade dans la médiocrité et la mort. Le détachement est donc vécu pour la plupart d’entre nous comme une contrée froide et aride… plutôt rebutante. La voie de Bouddha ? Passionnant mais… pas pour moi, pas pour cette vie ! nous résignons-nous inconsciemment.

Et pourtant, la voie du détachement qui mène à ce faux vide intérieur, nous offre la lucidité et la vraie liberté. Nous cessons d’agir en automates et de nous gameler sans cesse, pour devenir maître de nous-même et de notre destinée. Et je me demande si, par hasard, la voie du détachement qui mène à se dés-identifier de toute chose et de tout attachement néfaste, ne nous mènerait pas justement hors de ce vide existentiel si pesant ? Si elle ne serait pas une porte, la seule porte possible, pour atteindre enfin la Vie ? Et entrer dans la danse. Puisque c’est l’égo, après tout, qui nous sépare les uns des autres et nous coupe de la vie… C’est une belle perspective qui demande une certaine dose d’abnégation de soi et de courage. Saurons-nous faire ce pas ? Je crois en tous cas que ça vaut la peine d’essayer.

Car dans cette danse, on ne serait plus l’acteur principal mais un élément heureux de faire parti du Tout, d’avoir sa place, son rôle, emporté joyeusement dans le don de soi et le partage…

Iori

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