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Le réveil du guerrier intérieur – Au nom du Ciel 9

Comment réagir face à une attaque puissamment destructrice ? Dans ce nouvel épisode du roman autobiographique et channeling Au nom du Ciel, Ganji survit en allant chercher le guerrier intérieur en lui. Cette victoire va lui livrer le secret le plus préservé du monde.

La scène se déroule une nuit au Bois de Boulogne, en région parisienne. Ganji, alors adolescent, se trouve avec un petit groupe d’amis. Ils partagent et savourent ensemble le calumet de la paix et de l’amitié, à l’abris des regards, seuls au monde l’espace d’un instant, parmi une nature généreuse et maternelle qui les invite au relâchement…

Pénétré par la féerie nocturne et ses mille reflets lumineux, je me laissai enivrer par les senteurs végétales, absorbé tout entier dans ce paysage onirique sublime. Mes affres et cicatrices morales disparaissaient une à une par la grâce des herbes secrètes absorbées. Leur fumée voluptueuse traversait mes poumons et déversait ses étincelles réconfortantes dans mon sang. Le regard fixe, rivé sur le lac du Bois de Boulogne, je contemplais béatement les lampions des voitures voltiger à sa surface, formant une farandole de lampions qui s’agrippaient aux grands séquoias. Ce n’était plus le parc si ennuyeux des promenades dominicales mais un jardin étonnant où des formes fantasques paradaient par milliers.

Dans cet îlot de joie perché au-dessus de mes doutes et de mes souffrances, j’étais enfin en sécurité et en paix. Toutes les racines et les feuillages m’invitaient à l’indolence, me faisaient don de leurs secrets, m’accueillaient comme l’un des leurs. À leurs pieds, je le reconnus comme tel et leur jurai amour et dévouement. Ces géants verts me gratifièrent de leur joie car eux-aussi me reconnaissaient. Ma bouche phrasait des mélodies riches et exotiques et cette langue inconnue que j’avais fait mienne bouleversait chacun de mes atomes. Animal ou végétal, je ne savais plus à quelle espèce m’apparenter. Criblé d’épines mais fier comme ces arbres centenaires, je souhaitais une mort glorieuse et angélique : « Aspirez-moi dans les confins de l’univers ! Délivrez-moi prestement ! ». Ce furent là mes premières noces, alors que les oriflammes battaient sous la lune éclatante et que ma solitude esquissait une fugace retraite. Mais mon éternelle solitude devait me rejoindre bientôt car elle était mon unique compagne, la seule valable à mes yeux car au fond elle prenait bien soin de moi.

J’étais à mille lieux de toute considération profane car mon corps et mon esprit se disloquaient en d’indéfinissables poussières d’étoiles. J’avais abandonné le monde du connaissable, du concret, du défini ; j’étais devenu un puzzle sur lequel l’univers tout entier avait vigoureusement soufflé. Des rires oubliés, enfouis par milliers, surgissaient en pagaille. Je riais de tant rire, je riais comme un fou, à m’en damner.

À en croire nos aînés, notre petit groupe commettait un crime, mais la substance tant décriée n’avait à dire vrai rien de destructeur, bien au contraire. Où était donc l’affront ? Nous n’étions par un cercle de sorciers malfaisants, je ne voyais là qu’une simple rencontre secrète entre camarades de classe, une initiation aux paradis artificiels. Mais nous autres, comparses de l’absolu, poussés à croire en notre culpabilité, nous nous persuadâmes finalement qu’il était temps de rentrer.

L’heure tournait et déjà, nous devions retourner au monde adulte, urbanisé et métallique. Nous devions quitter cette obscurité rassurante, et mes camarades pressèrent le pas, je les suivis malgré mon désaccord. Nous étions satisfaits mais quelque peu inquiets. Mon âme poétesse fut ainsi projetée sur l’asphalte bruyant quand cent fois j’aurais préféré mûrir ce voyage jusqu’au bout des temps. À présent, la gueule grande ouverte, j’avalai la grisaille, le froid, le fracas des moteurs. Rester dans cet Éden des sens m’aurait sans doute fait le plus grand bien mais je finis par me convaincre que sans conscience, il m’était impossible de faire de bons choix. Je rentrai donc chez moi. Ce week-end-là, j’étais maître des lieux : seul chez moi, fort heureusement !

*

En pénétrant l’appartement vide, une chaleur incandescente saisit instantanément mes organes. Mes vêtements étaient de trop. Je m’en débarrassai un à un, les jetant violemment à terre. Mais subitement une masse invisible incroyablement massive et dense se jeta sur moi et m’écrasa, comme si elle se posait sur un insecte insignifiant. Plaqué au sol, j’étais incapable de gesticuler ou de crier. J’étais attendu. Un bûcher avait été dressé à mon intention. « Maintenant je vais te faire crever !», entendis-je. L’appartement vide et minuscule irradiait d’une folie extrême. Le cul de la bête était large et brûlant. Ô combien tout mon être n’était rien ! Humilié, je me désintégrais car il me semblait que des esprits archaïques souhaitaient à cet instant ma perte. Ce titan de feu avait pénétré la dimension humaine pour terrasser sa proie. Sa faim puait la cruauté, la jouissance d’anéantir. Mais je devais me risquer à la survie, me tirer de ces flammes. Durant vingt minutes interminables je ne pus me soustraire à la masse infernale, mais malgré des efforts surhumains, je demeurai à terre.

Ainsi, au fil des heures, le prédateur de l’Ombre m’avait dépecé de toute dignité et j’étais à présent marqué au fer rouge. Un être si insignifiant que moi avait-il le droit au salut ? Pouvais-je me tirer du néant dans lequel j’étais dissout? Alors, sans un doute, une voix timide mais franche s’éleva en moi et répondit par l’affirmative : je ne céderai pas mon âme à ce monstre. C’est ainsi que je fis l’expérience de la Suprême Volonté. D’où me venait-elle ? En vertu de quoi serais-je sauvé, moi que l’Enfer piétinait à cet instant ?

Aveuglée par son autosatisfaction, cette créature arrogante n’imaginait pas un instant que je pus me soustraire à son emprise. Je me dérobais donc, non sans mal, à mon puissant agresseur, me traînant péniblement à terre comme un mourant. Chaque doigt criait de douleur, ma chair encore fumante, ankylosée par cette densité invisible, essayait de recouvrer sa fierté originelle. Il me fallait un but : de l’eau et vite ! Ultime antidote au feu invasif qui dévorait mes entrailles. Je déportai ma volonté sur la salle de bain et rampai entièrement nu jusqu’à la douche, tirant à elle un à un tous mes membres. Avec l’énergie du désespoir, je tendis un bras lourd vers la poignée. Mon corps humilié exécuta quelques gestes ridicules en un temps si long qu’il me sembla vieillir. Alors un filet vivifiant aspergea mon corps entier, ranimant ma peau sans vie. L’obsession de ma réussite me tint lieu de présage et, ô miracle, je me vis survivre. De nouveau, je me hisserais droit et fier, mon corps reprendrait sa forme digne. À mesure que ma volonté enflait, le géant d’outre-monde paraissait disparaître. Il me fallait à présent reprendre des forces. Des heures que je n’avais rien avalé. J’attrapai un fruit et le mordit à pleines dents. Et son liquide bienfaisant acheva d’éteindre le brasier qui perdurait encore en certains endroits.

Étendu sur mon lit, je ne trouvai pas le sommeil. Figé par un angoissant questionnement, j’interrogeais la nuit. Les battements de mon cœur redoublèrent, flairant une intention indéfinissable. Le feu qui m’avait assaillit perdurait encore en un souffle chaud, tel un courant d’air discret qui avait progressé lentement jusqu’à mon esprit. Son langage clair et subtil parcourait les moindres replis de ma conscience tel un prédateur nocturne. En parvenant à mon cerveau, sa nature même me révéla le principe ultime de la vie terrestre, son énigme. À présent confortablement installé tel un renard dans sa tanière, il se confia à moi : son maître régnait sur le vaste monde des Hommes. Il se nourrissait de l’étincelle qui animait les corps, pur reflet du Divin, tel un insatiable chasseur. Les âmes qui s’incarnaient et prenaient forme humaine vivaient leur vie inconsciente toutes occupées à satisfaire leurs besoins, pour finalement se consumer en lui à leur mort. Il était parfaitement impitoyable, son mépris pour l’Homme était absolu. Je devinais son pouvoir sans égal, sa grandeur, sa laideur mais aussi sa beauté: tout ce que l’Homme créait de plus magnifique et de plus monstrueux, en son sein il le contenait.

De cette rencontre, je tus à jamais les détails infamants, je ne laissai personne lire dans mes yeux le récit de cet affront humiliant. Mais au-delà de mon regard, c’était tout mon corps qui maintenant savait. J’avais acquis en mon être entier la sainte perception, la connaissance réelle de cette ignominie vivante et prédatrice. Elle était là, omniprésente, à l’affût. Et pour échapper à ce fléau, il me faudrait muter, abandonner mon destin d’Homme, briser tout ce qui m’enchaînait à la Bête.

Ganji et Iurikan, entité spirituelle

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