Enseignement

Le secret de Dominique – Au nom du Ciel 8

Le 8ème épisode du roman channeling Au nom du Ciel est fascinant. Il met des mots sur ce que nous avons tous ou presque ressenti au moins une fois au cours de notre vie. Qu’y a-t-il de l’autre côté du visible ? Tel est le secret de Dominique…

Les pages que vous allez lire m’ont été transmises par mon guide Iurikan et sont de loin le plus beau témoignage que j’ai reçu du Ciel. Elles revisitent ma vie depuis ma naissance, en dévoilant le sens caché de chaque épisode marquant. On y découvre la scène occulte de notre monde mais aussi, la présence à mes côtés, discrète et touchante, des anges qui se sont promis de « me rendre un jour mon sourire » et ont fait de moi celui que je suis aujourd’hui. Ganji

Une belle après-midi d’automne s’offrait à moi. L’air était vif sur le pont de Neuilly, la Seine apportait avec elle les rigueurs de la nouvelle saison, mais le vent ne parvenait pas à effacer le sourire béat sur mon visage. Je me hâtais de rejoindre le petit groupe convié à une rencontre que je trouvais bien mystérieuse. Dominique m’accueillit avec un rictus satisfait que je ne lui connaissais pas. Je rejoignis le groupe et nous fûmes tous introduits dans une vaste pièce du complexe sportif de l’île du Pont de Neuilly, qui servait de coutume de salle de réception. Tel un antique monolithe, la lourde masse du téléviseur reposait fièrement devant quelques rangées de chaises d’écoles. Un culte secret lui serait rendu.

En prenant place parmi mes camarades d’école, une sourde inquiétude totalement irrationnelle me gagna et nulle explication rassurante ne parvint à mon esprit. Les rideaux furent tirés. Une excitation palpable et singulière agitait également mes camarades de classe. « L’exercice » devait pourtant être un film bien banal, un brin comique sans doute. J’imaginais déjà des scènes cocasses où les élèves font vivre les pires misères aux enseignants loufoques. Pourtant les premières images du film m’indiquèrent bien vite le ton, plutôt inquiétant. Un silence oppressant saisit la salle plongée à présent dans la pénombre. Notre hôte, le petit Dominique nous invitait en fait au sordide, chose que je compris bien vite.

Les images mirent un long moment à arriver. Un écran noir muet, lentement traversé de haut en bas par une ligne blanche, hypnotisait déjà mes camarades. Apparurent alors les premières scènes qui nous fîmes croire tout d’abord à un film d’aventures se déroulant au Moyen Orient. Puis le titre s’imposa vulgairement sur l’écran et créa une vague de panique dans la petite assemblée : L’exorciste ! Quelle était cette méprise, avais-je mal compris mon ami Dominique ? Y avait-t-il eu un malentendu ? Puis soudain une statue effrayante s’imposa de toute sa force malfaisante dans un décor brumeux sinistre. J’eus un sursaut et l’envie de fuir immédiatement. Mais face à ce groupe rivé à l’écran, je n’eus pas le courage de paraître impoli. Les premières scènes avaient eu un impact terrible sur nos esprits: nous étions tous littéralement pétrifiés. Mes yeux se détournèrent de l’écran pour observer mes camarades qui eux-aussi paraissaient paralysés, étrangement avalés par le poste de télévision. Je notai quelques rires discrets. Ma conscience s’obstinait à imaginer un improbable scénario, cherchant désespérément un éventuel fil conducteur rassurant, mais sans y parvenir naturellement tant l’atmosphère du film était inquiétante. Ce film étrange n’avait pas de commencement ni de fin, aucune intrigue selon moi. Le sens logique ne pouvait s’appliquer à une telle œuvre artistique. J’étais tout à la fois dérouté et fasciné.

D’invisibles créatures me retenaient sur ma chaise et me muselaient littéralement. Décomposé, j’étais incapable de toute réclamation. Seuls mes yeux se débattaient dans leurs orbites, cherchant une issue impossible. Quelle étrange artillerie se déversait sur nos cerveaux d’enfants naïfs, provoquant une telle alchimie redoutable ?! Par on ne sait quel mécanisme, nous étions à présent totalement identifiés à la jeune victime du film, en prise avec les anges de la mort. Comme elle, nous subissions les atteintes des démons. L’atmosphère métallique de la salle réduisait à néant tout élan vital. Nous étions véritablement aimantés, à la merci de la meute invisible qui s’était invitée et nous caressait de sa langue râpeuse. Fascinés par cette vérité parallèle que le film révélait à merveille, nous nous faisions proies, pour la plus grande satisfaction de ces créatures abyssales. Le film m’ordonna de me soumettre corps et âme à la monstrueuse réalité : je compris soudain que depuis toujours j’étais absent à moi-même et à ce monde. Je n’avais jamais été maître de mon corps, ni de mon esprit, et encore moins de ma destinée. J’étais venu au monde pour livrer bataille et je ne pourrai m’y dérober. L’ignorance de ma condition n’était-elle pas d’ailleurs un piège de plus que cette vie perverse m’avait tendu ?

Un vertige innommable me gagna et ne me quitta plus de la soirée. Mes parents ne m’avaient jamais connu aussi silencieux et discret. Et c’est sans peine qu’après le repas je m’allongeai sagement sur mon lit, à la façon d’une victime qui attend le coup fatal. J’avais déjà été condamné cette nuit fiévreuse de mes huit ans, mais cela ma mémoire l’avait sournoisement occulté. Seules subsistaient les indicibles révélations que ce film répercutait durement dans mon corps paralysé.

Je passais donc la soirée dans ma chambre, attendant avec appréhension l’extinction des lumières. Tout en moi s’était fait muet, j’étais atterré. Un immense « Pourquoi ? » s’était abattu sur moi. Cet ouragan dévastait tout sur son passage, paralysant mes fonctions vitales et cérébrales, me maintenant dans l’inertie la plus totale. Cet état de crise permanent ne me lâcherait plus désormais. Il m’incarnerait jusqu’au bout du chemin et peut-être même jusqu’à la tombe. Ainsi ma condition de victime condamnée m’avait été révélée dans une langue inconnue, à laquelle j’étais longtemps resté sourd.

Bientôt, d’atroces frissons déferlèrent dans mon corps par vagues successives jusque dans mon cerveau. Ils avaient déjà gagné : empruntant des couloirs sans-nom, ces parias des limbes avaient traversé des passages inconnus pour s’inviter sur la scène de mon monde. Là où l’inconscience prévaut, les victimes se comptent par millions, et moi, simple bille de verre, il me soumettait malgré moi à leur jeu cruel. Je ne bougeais plus car je les sentais tout proches, m’observant de leurs yeux exorbités plein de malices. Ils avaient un appétit obscène sans limites et voulaient goûter à ma jeune existence qui paraissait pourtant bien insignifiante à mes yeux. Recroquevillé au creux d’une inconfortable moiteur, je tirai sur les draps pour me voiler leur horrible présence.

Mais j’avais envie de me soulager, ma vessie était douloureuse. J’aurais tout aussi bien pu uriner sur place tant je cherchais à me faire oublier, l’immobilisme total était peut-être ma seule issue. Leurs pensées sournoises et ardentes enflammaient l’alcôve où je faisais pénitence. Et je vis enfin une échappatoire : fuir dans l’oubli et sombrer dans le sommeil, saisir cette autre brèche et la saisir à tout jamais. Je mouillerais sans doute mes draps mais au moins je sauverais ma vie. Doucement, ma conscience se dilua dans les entrelacs du temps où les dimensions s’entrecroisent. Mais que deviendrait mon corps ? Car lui ne bougeait pas, cloué à cette vie comme un insecte épinglé sur un cadre par un inquiétant collectionneur.

La trappe s’était refermée sur moi froidement, une fois de plus, sans égard pour mon innocence et mon cœur. Que me voulaient-elles encore ces ignobles créatures ? Quel était ce plan qui m’avait réduit à rien au milieu de cette salle trop grande, colorée par d’affreuses lumières. Cette télévision, en vrai totem sacrificiel, m’avait saigné comme un vulgaire agneau. Ainsi c’est sans grande peine ni résistance que je laissai faire l’humiliant sabbat qui s’acheva cette nuit-là par le festin de ma virginale existence d’enfant de douze ans. Pourquoi les portes de l’Enfer s’ouvraient-elles ainsi devant moi avec autant de facilité et d’empressement ? Pourquoi venait-on à moi en nombre si goulûment ? Qui étais-je au fond pour être ainsi convoité ? Les réponses à ces questions demeurèrent longtemps obscures, cachées dans les méandres de mon existence en devenir. Avais-je accueilli de nouveaux êtres ce soir-là ? Je ne me risquai pas à la nuance et décidai d’occulter ces phénomènes d’un autre siècle. Mais finalement, avais-je vraiment le pouvoir d’oublier ? Avais-je seulement le choix ?

PS: malgré la situation qui parait désespérée, Ganji va choisir au début de l’adolescence un chemin qui va le sauver et l’élever. Vous le découvrirez en lisant les prochains épisodes…

Ganji / Iurikan

Chamanisme, Enseignement,
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