Enseignement

Voyage initiatique au Gabon en quête de guérison

Retour sur notre périple initiatique en terres gabonaises. C’était il y a plus de 10 ans maintenant, Iori recherchait activement un moyen de guérir, elle rencontra là-bas un sorcier et une nganga Bwiti.

Cap sur le Gabon, terre d’initiation

Nous venions de passer plus de 3 mois sur l’île de São Tomé, en Afrique Équatoriale, vadrouillant au gré de nos inspirations. Chaque jour il nous suffisait d’emprunter de nouvelles routes en motocyclette avec pour seule indication une direction : Est, Ouest, Nord ou Sud ! Nous savions que partout c’était fascinant de beauté. Cette île regorgeait de plages magnifiques et de forêts tropicales luxuriantes. Sur la route, nous ne rencontrions jamais d’encombres, et pour cause, São Tomé est très peu peuplée.

Je me souviens parfaitement de cette après-midi passée sur la plage de Santana : nous étions entourés de cochons sauvages qui nous faisaient beaucoup rire. En observant l’horizon, nous imaginions la côte gabonaise qui se trouvait en face, à quelques 500 kilomètres au large. L’Afrique nous appelait et nous décidâmes de répondre à son appel. Iori souffrait depuis longtemps de douleurs vives dans le côté droit de son corps, à la hanche, à l’épaule, au bras et aux cervicales, parfois elle subissait des crises très violentes assorties de migraines. Coûte que coûte, elle était décidée à aller chercher la guérison au Gabon, le pays de la merveilleuse Iboga, plante chamanique sacrée.

Le lendemain, nous partîmes chercher un visa à l’ambassade du Gabon, qui nous fut accordé assez rapidement. Sur place, nous fîmes la connaissance d’une femme d’âge mûr,  assez grande et autoritaire, forte de son statut. Elle se réclamait de l’ethnie Fang, l’une des ethnies dominantes au Gabon. Bien que peu sympathique, elle lut dans nos pensées et nous donna l’adresse d’un guérisseur établi près de la capitale Libreville. Mais plus tard, nous découvrîmes malheureusement que le soi-disant nganga (chamane) était d’avantage un sorcier.

Nos premiers pas au Gabon : visite du parc national Akanda

Dès notre Arrivée a Libreville, le chauffeur de taxi nous donna rendez-vous pour le lendemain : nous devions absolument visiter le parc national Akanda, au nord-est de Libreville. C’était complètement magique de se retrouver dans ce paysage semi aquatique de mangrove, entouré de sons étranges d’oiseaux qui nous parvenaient de toute part. Quelques fois, nous parvenions à en approcher un de près et notre chauffeur de taxi, qui était aussi guide, tentait de nous enseigner son nom et ses habitudes. Certains amphibiens et tortues se prélassaient sur les plages et certains volatiles venaient manger quelques graines dans nos mains ! Notre séjour s’annonçait bien : le Gabon était un véritable sanctuaire dédié à la vie sauvage. Ce pays serait-il notre terre promise ?

Cet avant-goût nous exalta littéralement (peut-être un peu trop). Mais bien vite, l’intérieur du pays nous fit signe, nous voulions rencontrer ce fameux guérisseur qui nous avait été chaudement recommandé. Dans le centre ville, des militaires nous proposèrent de nous emmener avec eux tout près du village où nous voulions nous rendre, dans un camion de l’armée. Nous trouvâmes l’idée intéressante d’autant qu’il s’agissait d’un véhicule solide et puissant, cela nous rassurait vu l’état de certaines routes. Après quelques centaines de kilomètres, la voie bitumée se transforma en piste, la terre devint rouge et poussiéreuse, la chaussée irrégulière et accidentée.

Rencontre des Pygmées : le choc des cultures

Nous arrivâmes finalement aux abords d’un village pygmée où nous assistâmes d’entrée de jeu à une embrouille entre un groupe de Pygmées et un gabonais Fang, ce dernier, visiblement éméché, leur exprimait avec véhémence sa supériorité en leur disant qu’ils n’étaient pas de vrais humains, et qu’ils n’avaient pas d’âmes. Iori et moi étions profondément choqués et blessés par cette scène, nous qui avions depuis longtemps désirés rencontrer ce peuple indigène qui vit au cœur de la foret et utilise l’Iboga depuis bien avant les Fang et les autres ethnies du pays. Nous avions en effet la plus grande admiration pour ce peuple premier si profond de part son humanité et sa science du Vivant.

Il nous fut proposé de dormir dans l’une des cases de ce mini village mais, de façon implicite, cela voulait dire accepter de se laisser servir et traiter en rois par les pygmées, puisque nous étions des touristes blancs. Après cette scène qui nous avait fait comprendre pas mal de choses, cela nous mettait très mal à l’aise et nous choisîmes de dormir en retrait, à l’arrière d’un container abandonné, nous avions bien sûr pensé à apporter nos sacs de couchage. Nous repartîmes dès le lendemain matin. 

Expérience extrême avec un sorcier vaudou

Chemin faisant, nous fûmes agréablement surpris de constater que chaque personne croisée connaissait Papa Jean-Marie-Claude, cela nous rassura bien-sur. C’était un personnage souriant, grand et mince. Il nous reçut dans dans sa hutte ronde, au toit de chaume, et nous présenta l’autel des ancêtres, qu’il allait invoquer pour faire sortir le mal du corps de Iori. Nous reçûmes notre deuxième choc : c’était un véritable autel Vaudou !!! Au centre siégeait fièrement un crâne (authentique) avec une clope au bec ! Sur le moment ce détail nous amusa beaucoup mais Iori allait bientôt en comprendre l’utilité… L’endroit était sombre, il y avait tout un tas d’objets autour du crâne mais nous n’en retînmes pas grand-chose tant notre attention était rivée sur sur ce personnage si peu commun.

Le sorcier nous demanda de revenir le lendemain matin avec tout un tas d’ingrédients que nous devions acheter : 1L d’essence, 1L de vin rouge, 1 sac de riz, 1 sac de farine de manioc, 1 paquet de cigarettes, 1 poule noire vivante ! Etc etc… La liste n’en finissait pas. Iori était effrayée mais elle ne voulait plus reculer, nous avions parcouru tellement de kilomètres, elle était obsédée par l’idée de se débarrasser de son mal par tous les moyens, et elle savait que plus jamais une occasion pareille ne se représenterait à elle. Recourir au Vaudou ? Pourquoi pas se disait-elle, si cela pouvait terrasser le mal puissant qui était logé en elle.

Le lendemain elle se présenta au rdv, munie de tous les ingrédients de la liste, poule comprise ! Elle entra, seule dans la hutte où le sorcier la fit immédiatement se déshabiller ! Elle eut peur mais resta confiante, l’homme n’était pas particulièrement inquiétant, depuis le début il nous avait mis en confiance. Il alla immédiatement placer plusieurs cigarettes dans la bouche du crâne et les alluma toutes. Puis il demanda à Iori de se placer au centre de la hutte et d’aller chercher toute sa foi, toute sa rage et détermination pour guérir. Il lui transmit une prière et tous deux prièrent à voix haute, il lui demandait d’aller chercher plus de force, plus de conviction, plus de véhémence ! Iori était intimidée et elle avait du mal à se lâcher, dans cette tenue d’Ève, mais bientôt elle oublia le froid et sa nudité. Car à mesure que celle-ci déclamait sa prière à voix haute, le sorcier tournait autour d’elle et fit tournoyer dans les airs la poule tenue fermement dans sa main. La pauvre en mourut au bout de quelques minutes. Il continuait de tourner autour de Iori en l’aspergeant au fur et à mesure avec les autres éléments qui, peu à peu s’agglutinèrent sur son corps et ses cheveux, formant une mélasse épaisse. Elle se retrouva enfin recouverte de la tête au pied de cette matière à l’odeur infâme.

Quand je la vis sortir de la hutte, toute collante, la face, les cheveux et le corps recouverts de grains de riz et de farine (elle arrivait à peine à ouvrir les yeux!), dégageant une odeur absolument répugnante d’essence, de cigarettes et de vin mélangés, elle était livide et tremblotante. Elle ne dit mot pendant tout le chemin que nous fîmes pour regagner l’hôtel. Le sorcier avait insisté pour qu’elle reste ainsi sans prendre de douche pendant 3 jours ! Mais il nous fut absolument impossible de dormir dans ces conditions. Iori résista toute la nuit à la tentation de se laver, mais au petit matin, elle n’y tint plus et alla se précipiter dans le lac qui se trouvait juste au pied de notre hôtel. La vérité, malheureusement, c’est que cette opération magique avait été un véritable fiasco car elle ne ressentait aucun changement réel, rien ne s’était passé de probant. Le sorcier avait parlé d’aller faire une cérémonie au cimetière, si jamais ça ne marchait pas : hors de question pour Iori comme pour moi !

Initiation Bwiti puissante à l’Iboga

Notre séjour se passait désormais sous les meilleurs hospices : nous marchions beaucoup, empruntant les sentiers qui nous menaient aux villages de la région. Agréable façon de faire connaissance avec la religion Bwiti, qui prône l’utilisation de la racine sacrée : l’Iboga. Quelques jours avant notre départ du Gabon, Iori décida de poursuivre sa lutte en prenant part à un rituel Dissumba, pour recevoir une initiation au Bois Sacré auprès de Mama Menguema, la nganga qui m’avait moi-même initié au Bois Sacré des années auparavant et avec laquelle j’avais poursuivi ma formation de chamane depuis. Mama Menguema était mère de dix « enfants de sang », et de 25 « enfants spirituels », dont je faisais parti 🙂 Elle était nganga (chamane), tradi-praticienne spécialisée dans la guérison des maladies psychosomatiques, et mère spirituelle et Initiatrice du rituel Mboumba Yano.

Deux autres femmes vinrent se joindre à la cérémonie, rythmée par des cris « Bokayé ! Bokayé !! » scandés par la marraine. C’était très impressionnant de sentir cette force commune quasi animale au milieu des bois. Nous marchâmes tous ensemble en file indienne jusqu’à la rivière ou Iori se baigna avec les autres femmes présentes. La marraine les lava de la tête aux pieds avec des herbes spéciales et plongea leur tête dans l’eau comme dans un baptême évangéliste. Moment sacré. L’eau était froide me dit Iori. De retour au temple, on nous pria de nous séparer : Iori alla s’asseoir sur une natte à coté des autres. Et moi, je restai sur un banc, avec les musiciens. 

Ce fut pour elle une expérience extrêmement forte et initiatique car l’Iboga était fraîche et très puissante. Très vite, Iori partit dans une transe profonde et rencontra le Cobra Sacré, l’énergie de la guérison et de la Connaissance ultime. Elle sut tout de son problème : la nature et l’origine de cette maladie mystérieuse et incurable, l’endroit de son corps qui était affecté, et comment se soigner. Le problème était bien d’ordre occulte (ésotérique) et son corps énergétique était très profondément atteint. Elle reçut de l’Iboga des soins réparateurs très intenses, elle pouvait sentir l’énergie circuler abondamment dans ses membres et dans les zones affectées. Finalement, cette initiation secrète fut extrêmement réconfortante et bienfaisante pour elle, et ce, malgré l’inconfort du lieu. Le lendemain matin, je la vis rayonnante, marcher sur la pointe des pieds et parler avec une voix d’enfant. J’avais assisté à sa renaissance !

Notre bilan : un « sacré » voyage !

Deux jours après nous revînmes dans la capitale. Notre chambre d’hôtel surplombait la baie de sable noir-doré et j’allais parfois m’asseoir sur les marches de la terrasse pour admirer le coucher de soleil sur le lac immense. Je fus très vite rejoint par notre guide local, avec qui j’avais souvent de longues discussions sur l’Europe et sa politique néo-coloniale. Instantanément mon regard se posa sur une silhouette au loin, au-delà de la crèche d’enfants à l’air libre qui s’amusaient si forts qu’ils paraissaient seuls au monde. Cette silhouette je ne la reconnus pas immédiatement, elle paraissait se fondre dans l’eau comme une créature aquatique non identifiable. Le temps suspendu me donna la sensation d’un début du monde où chacun était témoin sans même le savoir. C’était les bras de Iori, et son regard lointain qui touchait l’Éternel. La contempler faisait un bien fou car elle avait l’air si heureuse, si pleine de la vie. Ses gestes étaient un hymne au Sacré et je sus que notre intention première avait à cet instant trouvé sa raison d’être.

Ganji et Iori

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